Les extraterrestres à la ferme

Instigateur : François Querry. Photo : Natacha Marleau
Contributeurs(trice)
: François Querry, Martin Boisvert, Normand
Lebeau, Lise Breton, Jean-claude Teroin .
Une maison de campagne au coin d'un rang de bout de champ..,.
Un OVNI reste stationnaire au-dessus si bien que la maison est plongée dans l'ombre et qu'on y allume les lampes
L'intérieur de la soucoupe est mis à jour
fréquemment, selon l'aménagement et les divisions
intérieures désirées grâce à une
nanotechnologie commandée d'une simple formulation
langagière encore indéchiffrée
Dans la maison en bas, la nuit, on y fait des rêves étranges...
Toujours l'impression qu'une ostie de lampe qui a plutôt l'air
d'un suceur d'aspirateur se penche sur toi et inonde les
circonvolutions supérieures de ton cerveau endormi d'une
lumière indéfinissable
Pendant ce temps-là au-dessus dans la soucoupe, un des veilleurs
intergalactiques qui a son tour de ronde pendant que ses
collègues endormis se font remoduler le cortex dans des
incubateurs d'exo-conscience se sert un verre de xwktphrrr et se fait
monter une table bistro qui était sur la terrasse arrière
en bas...
Il a liftée-téléportée cette table,
premièrement parce qu'il avait besoin de déposer son
verre, mais aussi par ce qu'il y avait un papier dessus avec une
écriture en pattes de mouche, et un objet dont il s'amusa fort,
un stylo à déclenche...
Ils décidèrent de rentrer par le faisceau suivant
d'espace-temps pour en quelques secondes se retrouver entre La Terre et
la lune... Et d'organiser dans le vaisseau-mère un
congrès télépathique sur l'écriture
manuelle des Terriens
Cela ne les édifia pas autant que la société des termites mais bon...
Il y aura un retour sur cette maison
C'est ainsi que Xwztphrzinxy prendra plus tard les traits d'un humain pour devenir aide-fermier (François Querry)
Xwztphrzinxy aimait être aide fermier. C'était sa
façon de communier avec la nature de la planète terre que
ses compatriotes se contentaient d'exploiter avec leurs ondes mentales
pour moultes futiles activités qui meublaient la vie en
soucoupe... Xwztphrzinxy avait choisi une ferme très modeste. Il
avait "endormi" l'ouvrier de service, nommé Jean-Jacques, pour
prendre son aspect physique et ensuite le téléporter vers
le vaisseau mère, où, le pauvre sera mis à
contribution pour servir des apéros aux extraterrestres.
Xwztphrzinxy était devenu vite ami avec un cochon avec qui il
communiquait télépathiquement. Il aimait aussi la famille
Côté-Deschamps qui l'employait croyant toujours qu'il
était Jean-Jacques. Il ne pouvait pas parler mais il avait un
peu pitié d'eux qui se faisaient vampiriser chaque nuit,
à leur insu, par l'immense et invisible soucoupe volante.
(Martin Boisvert)
À l'intérieur de la soucoupe, Jean-Jacques, perplexe,
reconnaît la table bistro, et, sur les papiers épars le
style d'écriture de la fille du fermier. Il se tourne vers celui
qu'il estime être leur commandant et sa colère laisse
place à de l'admiration pour la technologie environnante et
leurs visages bleu-vert aux yeux de chat. Stupéfait, il n'a
qu'un mot : "Tabarnack !" - fascination des extra-terrestres autour.
Pensant que l'ouvrier vient de se présenter, le commandant
répond : "Sois le bienvenu, Tabarnack, sers-nous à boire
s'il te plaît!" - Étonné de se le faire demander de
cette façon, mais curieux de la bouteille qu'il voit
derrière eux, il répond : "À une condition, que je
trinque avec vous!" Le commandant acquiesce. Jean-Jacques les sert,
puis prend une lampée à même le goulot. Il n'a
jamais rien bu de tel! Il vise le lettrage sur l'étiquette -
Xwktphrrr - et dit dans un mélange de colère et
d'euphorie : "Mais vous allez ben me dire qu'est-ce que je fais icitte?"
Madame Fernande sort une tourtière du four et la dépose
sur la table d'où son fumet monte au nez de 'Jean-Jacques'.
Monsieur Roger dit : "Jean-Jacques, pour fêter tes vingt ans de
service, tu restes à souper avec nous!" Le père Roger va
au vaisselier et en sort une bouteille de gin d'Ungava en disant : "De
toute façon faut que la tourtière refroidisse!" - Pendant
ce temps l'ingénieur de la soucoupe, Zvwomb, ayant trop bu de
Xwktphrrr, fait une fausse manoeuvre au tableau virtuel qui provoque
une panne-éclair du système de communication - Madame
Fernande et monsieur Roger regardent médusés leur
employé qui vient de caler le petit verre de gin et pendant une
seconde, ils voient la tête de Jean-Jacques virer au bleu-vert et
ils capotent un peu en voyant les yeux de leur chat à la place
de ceux de l'engagé. Puis tout revient à la normale.
Roger demande : "Ça va Jean-Jacques?", et Xwztphrzinxy de
répondre à nouveau sous les traits de Jean-Jacques : "Oui
oui", pendant que Roger lui remplit son verre en se disant que
ça lui servira de remontant.(François Querry)
Ce que les terriens appelaient alcool était beaucoup plus
dommageable que le Xtphrrr qui tonifiait au lieu de brûler et
d’engourdir. Xwztphrzinxy dit poliment à Roger Deschamps
que l’alcool n’entrait plus dans son gosier ce soir. Il
quitta ses hôtes pour aller relaxer dans la grange avec son grand
ami, Basile le cochon. En franchissant les portes, Xwztphrzinxy envoya
un salut télépathique à la bête qui ne
répondit point mais le regarda d’un air triste.
Xwztphrzinxy fit une incursion rapide dans le cerveau de son ami pour
s’apercevoir qu’il avait peur de la mort, qu’il
croyait très rapprochée. La raison de ses
appréhensions était l’approche d’une grande
fête, et, dans cette ferme autosuffisante, il était
sûr de faire partie du prochain festin. Basile était
couché dans la paille et Xwztphrzinxy s’en approcha et
l’enlaça en lui envoyant un rassurant message
cérébral : « Ne t’en fais pas Basile, mes
copains, dans la soucoupe volante, contrôlent les rêves et
influencent les pensées des Côté-Deschamps. Nous
allons les convertir au végétarisme d’ici 48
heures. Ils auront même le dégoût de la viande et de
toute cette barbarie. » Il resta couché à
côté de la bête et la rassura. C’est alors que
la fille du fermier fit irruption dans la grange, fortement
décolletée et dépourvue de soutien-gorge. Celui
qu’elle connaissait sous le nom de Jean-Jacques, dont les
extraterrestres avaient exactement copié l’aspect en
oubliant totalement la libido car cet élément
était ignoré par leur espèces depuis au moins un
millénaire, eut le réflexe de se blottir auprès de
son ami cochon, intimidé par cette femelle
échauffée qui lui cria : « On se flirte depuis des
mois et au moment tant attendu, je te trouve couché avec un
cochon. Sale pervers !!! ». (Martin Boisvert)
"Mais comment ça se fait que vous parlez français au
juste?" Question pertinente de tout téléspectateur de
Twilight Zone qu'il fut, ce à quoi répond le commandant
du vaisseau et pointant du doigt les incubateurs à gauche "Ben
grâce aux incubateurs d'exo-conscience, ostie!" dit-il avec un
sourire qui surprend sur ces faces habituellement si insipides...
Jean-Jacques sourit. "Bon, tu as compris qu'il faut que nous te
téléportions d'urgence, car ta belle a besoin de toi! ...
et nous allons remonter cet enfoiré de Xwztphrzinxy, tu reprends
sa place! Mais avant de nous quitter je vais te dire ceci : nous sommes
ici pour aider l'humanité!" ...---... Sur ce, Zvwomb raccompagne
Jean-Jacques au plateau de téléportation transparent au
centre de l'étage inférieur de la soucoupe, à ce
point qu'il voit en-dessous de lui, à travers une planche
manquante du toit de la grange, le tapis de foin et ce torieu
d'imposteur avec sa belle en dessous. Jean-Jacques, dit au revoir au
commandant de la soucoupe. Oumppafkjwiiiz s'approche et lui remet en
guise de cadeau d'au-revoir une bouteille neuve de Xtphrrr en lui
disant : "Et tu nous rapporteras une bouteille de Gin d'Ungava en
échange!" (François Querry)
Copains comme cochons, Jean-Jacques et le porc se tapèrent un
mousseux en faisant un backgammon pour célébrer la mise
au végétarisme des Côté-Deschamps. Basile
pouvait désormais envisager une longévité
suffisante pour exercer une profession. La fille du fermier,
décontenancée par l'indifférence de Jean-Jacques
à son égard et dégoûtée par ses
penchants zoophiliques envisagea une retraite au couvent. Quant
à Basile, il eut un éclair de génie qui scella son
destin. Comme la peau du cochon est semblable à celle des
humains, il décida d'emprunter celle de politicien. En effet,
quel est le rôle d'un politicien, sinon servir autrui ? Beau
parleur, il ne faut pas s'étonner qu'encore une fois, un cochon
se fit élire. Basile devint un grand député et un
ministre à la tête de cochon, qui plaida si ardemment la
cause des extraterrestres que le Stade olympique de Montréal fut
transformé en ambassade. (Normand Lebeau)
Les deux Jean-Jacques se connaissaient bien et étaient
même devenus complices. Xwztphrzinxy profitait de
l’identité de son ami apprécier la vie saine de la
ferme et avoir des conversations télépathiques avec
Basile le cochon tandis que Jean-Jacques aimait bien faire le pitre en
faisant le barman dans la soucoupe volante. Les extraterrestres
éclataient de rire chaque fois qu’il faisait des pets avec
sa main et son aisselle. Les deux s’échangeaient les
rôles, s’assurant ainsi, de part et d’autre, une
double-vie des plus intéressante. C’est Xwztphrzinxy qui
était responsable de l’ascension politique de Basile. Il
avait, dans un plus grand secret, greffé un peu de peau du
cochon à chaque candidat membre de l’équipe, ce qui
leur donnait de grandes vertus d’orateurs. On appela cette
opération la peaulitique. Leurs discours enflammaient la
population. Bien sûr, pour être constitutionnelle,
l’élection d’un animal devait se faire avec la
présence d’une personne humaine comme colistière et
c’est Xwztphrzinxy, sous les traits de Jean-Jacques Tremblay qui
assumait ce rôle. Il était un fin stratège, il
avait attiré plus de 50 000 personnes, au stade olympique,
à la rencontre de la politique la plus cochonne et sa populaire
troupe d’hilarantes danseuses érotiques nommées :
« Les cochonnes rient » Quant au vrai Jean-Jacques, il
commençait à abuser du Xtphrrr, car, il n’en avait
parlé à personne, mais Cunégonde, la fille de la
ferme lui manquait énormément et il s’en voulait
d’avoir raté cette occasion de faire l’amour pour la
première fois à 48 ans. Au couvent, celle qu’il
désirait tant, faisait une psychose et hallucinait des cochons
partout. La mère supérieure qui constatait que les
prières étaient vaines songeait sérieusement
à téléphoner à l’ambulance. (Martin
Boisvert)
Pendant que Cunégonde, fille de fermier frustrée,
continuait de se faire du sang de cochon, le comité de direction
de l'OLTPD, l'Organisation de libération des terriens purs et
durs, tentait de mettre au point un stratagème pour
empêcher les extraterrestres de prendre le contrôle absolu
de la planète. Paul Merlan, P.D.G., (petit, distrait et
gourmand) vacciné en même temps que circoncis, contre tous
les pouvoirs des visiteurs de l'espace connus à ce jour,
s'adressait à ses collègues : « Vous n'ignorez pas
que nous devrons procéder bientôt à une campagne
massive de vaccination de nos membres pour éviter que les
Xwztphrzinxy et autres créatures n'interchangent leur diabolique
personnalité avec eux pour nous méduser. Et vous savez ce
qui est le plus grave ? Ces voleurs de grand espace ne paient pas de
taxe sur leur jus de pruneau biologique intersidéral. Quelle
infamie ! Il n'existe aucun impôt sur les importations spatiales
et nos seuls percepteurs sont dans la Lune, vous voyez le drame,
camarades ? » Sur ce, ses confrères et consoeurs se
levèrent pour lui accorder une Ovation bien
méritée, guitare qu'ils lui offraient pour son cinquante
cinquième anniversaire de naissance. (Normand Lebeau)
Sans le sous-estimer, Xwztphrzinxy craignait très peu son
adversaire et ses politiques rétrogrades... L'avenir venait d'un
partage de gouvernance avec les animaux. L'homme avait eu trop
longtemps le monopole du pouvoir. En se cachant habilement sous les
traits de Jean-Jacques Tremblay, l'extraterrestre faisait passer Paul
Merlan et son groupe pour des illuminés paranoïaques qui
hallucinaient une conspiration venue de l'espace. En fait, dans la
réalité, seuls certaines personnes proches de la ferme se
doutaient de la présence des extraterrestres mais à la
campagne, les rumeurs vont très vite. Plusieurs dans le village,
comme les Côté-Deschamps étaient influencés
par eux mais tout se passait pendant leur sommeil. Jean-Jacques
était un des rares citoyens à être totalement
conscient de la situation. Il s'intéressait peu aux
manœuvres politiques de Xwztphrzinxy, en revanche, il prenait son
rôle de barman, dans la soucoupe volante, très au
sérieux et ces temps-ci, il n'arrêtait pas de vanter
à ses clients, les mérites et la gentillesse de son amie
Cunégonde, leur faisant valoir qu'ils auraient bien de
l'agrément si elle venait travailler avec lui. Il négocia
quelques jours de congé pour aller la chercher et parti pour le
couvent déguisé en religieuse, prévoyant
s'introduire et délivrer sa bien-aimée d'une vocation qui
hypothéquait sa santé. (Martin Boisvert)
Cunégonde Côté-Deschamps n’attendit pas la
survenue d’un preux chevalier pour s’évader de
couvent. La frustration d’avoir à se lever à
l’aurore pour les prières lui fit compter pour rien le
manque subit d’intérêt que lui portait son ami
Jean-Jacques. Grand bien lui fit de s’en retourner à la
ferme car à peine entrouverte la porte de la grange elle vit les
deux Jean-Jacques échangeant leur bouteille juste avant
qu’un flot lumineux transperçant la toiture
n’emporte celui qui avait en sa possession la bouteille
d’Ungava. Sa frustration ayant fait place à la
méfiance elle choisit de se taire le temps de se faire une
tête après avoir rassemblé les faits plus ou moins
étranges qui semblaient s’accumuler à la ferme.
Ça avait commencé avec la disparition de son stylo et de
la table bistro; étrange disparition du fait qu’il
n’y avait aucun voisin à des kilomètres à la
ronde et que la table était des plus bancales, vraiment pas de
quoi appâter qui que ce soit. Avant de se pointer à la
grange elle s’était arrêtée pour aviser ses
parents de son retour; quelle ne fut pas sa surprise de voir son
père s’empiffrant de tofu, lui qui avait juré
qu’on ne l’y prendrait pas à brouter
végétalien. Et presque aussi étonnant que le
dédoublement de son Jean-Jacques, c’était
l’attitude de Basile qui arpentait son enclos en se pétant
les bretelles et en grognant comme un orateur s’enflammant au son
de sa propre voix, lui qui d’habitude semblait vouloir
disparaître sous la paille dès qu’un humain
s’approchait. Le regard de Jean-Jacques s’alluma quand il
aperçut Cunégonde. Ah! Elle savait maintenant auquel
Jean-Jacques elle avait affaire, mais sa préoccupation
n’était plus tant de plaire que de trouver une explication
à cette étonnante disparition, et au fait que son ami
semblait ne faire aucun cas de l’étrangeté de la
situation. Cunégonde regarda de plus près la bouteille
que Jean-Jacques tenait. Du X-w-quoi?, s’enquit-elle. Oh
ça, de répondre Jean-Jacques, on pourrait dire que
c’est du piqué de l’univers, tires-toi un ballot de
foin que j’te raconte... (Lise Breton)
Et alors arriva l'innattendu : Pour la première fois, ils firent
l'amour. Pour une fois, ils étaient vraiment humains... La
soucoupe au-dessus eut à composer avec une secousse de signal en
provenance de la constellation d'Orion au même moment, ce qui
l'avait même déstabilisée, mais le contact se
rétablit. Zwomb projeta l'image holographique de ce qui se
passait dans le foin en bas. Rien n'en fut plus opportun d'inaugurer la
bouteille d'Ungava pour souligner l'occasion. Ils en versèrent
au préalable dans le gosier du robot-goûteur R2Nip. Les
extra-terrestres, à vrai dire, n'utilisent pas de robot, ils
regardent de haut l'intelligence artificielle, invention folklorique
des Terriens. Mais celui-ci est un prototype d'une synthèse de
tout ce que les humains ont pu concevoir comme robot. (François
Querry)
Cunégonde se souvint alors d'un commerçant un peu bizarre
qui était venu un jour lui vanter les mérites de ses
recettes du Sud en jetant un regard avide aux meubles et lui attribua
la disparition ô énigmatique du stylo et de la
médiocre table bistro. Elle avait appris par le biais de la
radio locale que le colonel Sentheure dont on entendait vanter
quotidiennement le goût exquis du soi-disant inimitable poulet
frit à la Comme tronqué sur les ondes de
Radio-Péquenot était au bord de la faillite et que les
huissiers faisaient la ligne devant son domicile. Du petit appareil
radio de marque Viking qui jouait à coeur de journée, on
entendait Plume Latraverse chanter : Cunégonde, veux-tu du
fromage ? (Normand Lebeau)
Cunégonde aimait le fromage avec du sel dessus même si ce
n'en était pas l'usage. Et la chanson de dire : Alors mon
père, fourrez-vous le dans le cul. Ainsi, elle fantasmait sur
des relations anales impliquant du fromage mais sa relation avec
Jean-Jacques était trop jeune pour le pervertir à de
telles pratiques. Elle savourait plutôt son nouvel
épanouissement et son évasion du couvent. Elle
n'était plus jalouse du cochon, et connaissant son rôle au
gouvernement, elle se dit, en bonne opportuniste, qu'il valait mieux
s'en faire un allié. Quant à Merlan, il était
furieux, ses adversaires étaient salués par tous les
groupes écologistes, et son parti ne regroupait plus que
quelques milliers d'irréductibles carnivores. (Martin Boisvert)
Par ailleurs au parlement, le PPP, le parti des porcs
parallèles, lança une motion de dénonciation
baptisée Balance ton être humain. François Querry
Pour célébrer leur nouvelle union, Cunégonde
proposa à Jean-Jacques la soumission d'un projet audacieux,
l'édification de La Place des Lards, une sorte de place publique
avec une petite salle de spectacle. Jean-Jacques trouva l'idée
intéressante, tout en émettant quelques réserves :
Il nous faudra trouver le bacon, mais on verra, les permis, frais de
porc et de main-d'oeuvre risquent d'être salés.
Cunégonde pensa tout de suite à une blague de cabaret
qu'elle garda pour elle, mais se dépêcha d'écrire
dans son journal intime : Place de l'art salé. (Normand Lebeau)
Jean-Jacques et Cunégonde, s'essuyant encore des confettis
louèrent un espace commercial à Montréal, avec
l'aide financière du père de la mariée. Roger
Côté-Deschamps s'était fait à l'idée
d'avoir Jean-Jacques comme gendre, après tout, il connaissait
bien sa fille et il savait d'avance que c'est elle qui tiendrait les
cordons de la bourse. La Place des Lards attirait les amateurs d'art
salé, et ça fonctionnait bien : on y présentait
régulièrement du Veau-de-ville. (François Querry)
La combinaison de l'art salé et de l'art veau-de-vilesque
donnait une épreuve épique où les athlètes
, féminins et masculins, dans leur plus simple appareil, se
livraient à une épreuve de rodéo sur des veaux
dont les mouvements étaient parfois gènés par une
tenue de ville, Borsalino, chemise, cravate et veston, bien sûr,
faite pour leur taille. L'épreuve ultime mettait en vedette les
humain(e)s graissé(e)s, tentant de tenir un maximum de temps,
sur les animaux en délire, dans un accoutrement bon chic, bon
genre. Le veau qui réussissait à garder son Borsalino
tout le long de l'épreuve, était déclaré
grand gagnant. Les extraterrestres ne comprenait rien à l'art
mais voyaient d'un bon oeil ces activités qui rapprochaient les
humain(e)s et les bêtes. Outre ces numéros coquins d'art
salé, Xwztphrzinxy, sous les traits de Jean-Jacques,
présentait, toujours à la Place des Lards, un
numéro de télépathie mettant en vedette nul autre
que Basile le cochon. (Martin Boisvert)
Les recettes des spectacles cochons ayant été
généreuses, le couple n'hésita pas à
présenter un volet plus risqué, du théâtre
expérimental.
...
Têtes de tous âges plongées dans l'obscurité, le rideau s'ouvre alors sur une scène obscure.
...
Pour ce qui va suivre, parce que ce n'est indiqué nulle part
dans le programme des spectateurs - mieux vaut laisser ceux-ci dans
l'obscurité que de leur vendre la mèche - reculons dans
le temps. À bord de la soucoupe Xwztphrzinxy avait bel et bien
suivi des leçons intensives dans un incubateur d'exo-conscience,
scannant les cerveaux des plus grand noms du violon, complétant
sa formation avec quelques tutoriels sur Youtitube.
Subséquemment, les extra-terrestres avaient fait monter Basile
à bord, et l'ayant installé dans un incubateur, ils
appuyèrent sur le bouton Turbo, ce qui permit au porc de
développer pendant son sommeil commateux des neuronnes lui
permettant d'assimiler le langage humain.
...
Lumière se fait sur la scène : Basile côté
jardin, et entrant côté cour, Xwztphrzinxy sous les traits
du violonneux Rolland Lamothe-Deterre, accueilli par les
applaudissements du public.
Pendant ce temps-là, dans un CHSLD, le véritable Lamote-Detherre est dans un coma végétatif.
Xwztphrzinxy a emprunté l'identité de ce dernier,
premièrement pour ses qualités violonistiques, mais aussi
pour la chemise carreautée du célèbre musicien qui
lui va comme un gant de crin.
Entre le porc et le violoniste, au centre de la scène, trône une hache plantée dans une souche.
Basile couine "- Ça y est, tu dois faire ta job..."
bientôt couvert par les clameurs de l'assistance, surprise
d'ouïr un cochon parler.
"Oui, je dois te tuer, répond Rolland. Mais pour que la viande
soit bien tendre, mon rôle est de t'amadouer avec un air de ma
composition."
Et Rolland d'enchaîner avec une rhapsodie romantique. Basile bien
que touché se cambre de concentration et se met à faire
du Slam sur la musique de son sale ami.
Le vieux porc déclâmera en dansant tout le long de la
pièce un poème en strophes de sa composition implorant le
geôlier de lui laisser la vie sauve, ce que ce dernier lui
accordera finalement en concluant avec un set carré.
...
La pièce eut un succès boeuf.
Dans le hall à la sortie, des représentants de
Fontaine-Santé remettaient à ces dames et messieurs les
spectateurs, tous convertis au végétarisme, un petit
paquet de végé-pâté. (François Querry)
Madame
Fernande avait la couenne dure et le sommeil léger,
d’où son imperméabilité aux ondes
extraterrestres visant à convertir l’humanité au
végétarisme. Et pourtant, elle affectionnait ses
bêtes, tout particulièrement Basile, porcelet sevré
hâtivement et castré à vif que la DPJHA (Direction
de la protection de la jeunesse humaine et animale) lui avait
confié, et qui avait atteint son poids d’abattage depuis
belle assiette... Depuis son arrivée à la ferme il
faisait auge à part et quittait rarement l’enclos. La
thérapie animale suivie n’avait donné aucun fruit,
du moins jusqu’à tout récemment... En effet,
Basile, habituellement rébarbatif à tout contact humain
avait à l’endroit de Jean-Jacques une attitude
d’ouverture nouvelle, avec des états de fermeture des plus
inattendus, certains jours... C’était à se demander
si Jean-Jacques n’était pas un double personnage, un
visage à deux faces, flatteur d’une main, batteur de
l’autre, selon qu’il y aurait témoin ou non. Du
revers de la raison Madame Fernande balaya cette idée saugrenue
surgit de son cerveau conspirationniste primitif pour
s’imprégner de l’apaisant ronronnement montant de
sous la table... Elle aimait veiller dans le noir pendant que tout le
monde dormait à l’étage; les sons, les odeurs
retrouvaient leurs couleurs. Elle huma le parfum s’intensifiant
du fromage qu’elle avait mis à tiédir sur un coin
de table; depuis que son époux Roger avait
développé une aversion pour tout aliment de provenance
animale elle préférait s’abstenir de manger
certains mets devant lui pour ne pas gâcher son propre plaisir ou
heurter la sensibilité de son mari. Elle reprit une profonde
inspiration et le cours de ses réflexions... Ils étaient
rentrés de Montréal en fin d’après-midi
accompagnés de Cunégonde et Jean-Jacques qui vivaient
avec eux entre deux projets à La Place des Lards. Elle avait
bien ri du plaisir évident que prenait Basile à monter
sur les planches; par contre, l’emportement, voire la hargne avec
laquelle il prônait le végétarisme et
défendait la cause d’hypothétiques extraterrestres
présents sur terre, la laissait perplexe. Si les porcs, suite
à l’élection de Basile au PPP (Parti
parallèle des porcs, que le mécontentement populaire
avait rebaptisé le Parti pris pour les porcs) avaient
réussi à se tailler une place de choix dans la
société, force était de constater que les animaux
d’espèce non porcine n’avaient pas la même
veine... Pour sa part, elle préférait regarder ses veaux
gambader librement dans les verts pâturages plutôt que
réduits à la portion connes-grues court vêtues pour
exciter le genre humain... Mais passons, se dit Fernande, la terre
tourne, les générations se succèdent...
Cunégonde prendrait sous peu le relais; et quand sa fille avait
une idée en tête, quand elle prenait les choses en main
elle ne manquait pas d’arriver à ses fins; suffisait pour
s’en convaincre de constater la docilité béate avec
laquelle le troupeau se laissait traire... Un véritable
extracteur à jus, une main de fer à poigne de velours,
conclut sa mère... Sur les entrefaites : giclée de
lumière 100 watts plein la cuisine... Apparaît
Jean-Jacques, comme parachuté du second étage... –
Oups! Pardon! Avoir su que vous étiez là, Fernande...
– Il n’y a pas d’offense, Jean-Jacques, entres,
prends tes aises, de lui répondre Fernande avant d’ajouter
d’un ton pince-sans-rire en le surnommant, à part soi,
Double Face : «De quelle humeur es-tu à cette heure mon
Jean-Jacques, végé-pâté ou fromage?»
Et Jean-Jacques de s’étouffer avec sa salive, et de virer
au bleu-vert une fraction de seconde, comme la fois où Roger lui
avait donné à boire du gin; vert-bleuissant
légèrement à nouveau, Jean-Jacques alias Xfrinzi*
resta coi devant la question, se demandant si Madame Fernande, à
la manière extraterrestre savait lire dans les pensées de
sa fille, et du même coup, dans les siennes...
* traduction terrienne de Xwztphrzinxy
(Lise Breton)
Madame Fernande avait un flair redoutable,
elle regarda d'un air inquisiteur son "gendre".
Au même moment le chat venait d'arrêter de ronronner,
et le fixait lui aussi, les pupilles dilatées,
Le faux Jean-Jacques pâlit, perdit sa contenance et se retransforma progressivement en Xzwtphrzinsky,
incidemment à cause d'une panne de relais.
Il ne faut pas oublier que ses accolytes, en haut, testaient la bouteille d'Ungava.
Dehors aussi c'était la fête.
Aux limites de la ferme des hippies et des touristes campaient pas loin des limites du terrain,
faisant des
selfies à qui mieux mieux avec la soucoupe en
arrière-plan. Il y avait même une cantine roulante du
Colonel Sentheure.
Le tout pendant que Roger Côté-Deschamps venait de finir de réparer son tracteur.
Ce dernier
s'arrêta net pour souffler sous le soleil, et se tourna vers sa
maison plongée dans l'ombre de l'engin spatial, image qui le
rafraîchirait.
Mais cette ombre commença à vasciller :
Levant les yeux, Roger vit la soucoupe en train de tanguer,
puis s'éloigner de façon erratique pour aller s'écraser au fond du champ, au flanc d'un côteau.
Le sang de Roger
Côté-Deschamps ne fit qu'un tour : il enfourcha son
tracteur, le démarra en trombe et le dirigea vers les lieux de
l'accident.
(François Querry)
C'était
l'Ungava, ce gin tant prisé par les extraterrestres, qui avait
causé la perte de la soucoupe. Les aliens n'ayant pas de notion
sur les ravages de l'alcool au volant. Il fallu évacuer le
véhicule très vite , emportant, évidemment, les
deux bouteilles restantes du précieux gin. Les trois occupants
qui étaient dans la soucoupe étaient sains et sauf. Elle
était réparable grâce à la technologie
regénérative propre à ses pièces. Quand
Roger arriva sur les lieux du drame, nos trois lascars étaient
affairés à négocier le partage des deux fioles
récupérées de l'accident.
(Martin Boisvert)
Roger stoppe le
moteur de son tracteur et descend se porter à leur secours. Il
entoure la base de la soucoupe avec une chaîne fixée
à l'arrière du tracteur et s'attèle à
désenfouir l'engin de la vase dans laquelle elle s'était
enlisée. Pour le remercier, les extra-terrestres décident
d'inviter Roger, sa famille et son gendre - sans oublier Basile sous la
recommandation de Xzwtphrzinsky - à visiter en tant
qu'invités d'honneur leur planète d'origine.
Au jour J, le
quintette est téléporté dans l'engin spatial, avec
bagages, auge portative et glacère contenant des produits de la
ferme. Zwomb s'installe aux commandes.
Le ciel s'ouvrit
devant eux et les étoiles devinrent des lignes. L'alignement de
quelques trous noirs permit au véhicule intersidéral de
franchir l'espace-temps et de se retrouver dans la banlieue d'Orion, en
orbite autour de la planète Xphelazti.
Cette
planète rocheuse, de dimension presque identique à la
Terre, a une configuration gravitationnelle semblable. Son paysage
étrange arbore une faune et une flore des plus exotiques mais
avec l'aspect familier à l'oeil humain qu'il y a là aussi
des lacs, des fleuves et des rivières, à la
différence que le spectre lumineux de leur étoile fait
que l'eau est verte et la végétation bleue.
Survolant une
mégalopole, la soucoupe s'engage dans une allée
majestueuse bordée d'édifices aux dimensions titanesques,
dont la forme rappelle les termitières terriennes. Roger dit
à sa femme, "comment ils font pour vivre de même, toute
cordés les uns par-dessus les autres!"
Le lendemain de
leur arrivée, Roger, Fernande, Cunégonde, Jean-Jacques et
Basile sont invités à prendre place au centre d'une salle
de congrès où siègent non seulement des membres du
gouvernement mondial des Xphelaztis, mais aussi des ambassadeurs aux
morphologies tout aussi variées que leurs origines galactiques.
(François Querry)
Complotistes,
mon cul! lança Paul Merlan en jetant le journal sur la table de
conférence, après ça on viendra dire que la
faculté de parler des animaux et la conversion spontanée
au végétarisme d’une portion galopante de la
population sont le fait d’une évolution naturelle
liée à la sensibilité accrue de l’homme
à l’endroit de l’animal et non la conséquence
directe de manipulations secrètes exercées par un pouvoir
extraterrestre qui n’a même pas le courage
d’opérer à ciel ouvert. Voilà, ajouta Merlan
en martelant de l’index la photo de la soucoupe volante à
la une du journal, oui, voilà qui fera taire une bonne fois pour
toutes et retourner en son enclos ce pourceau de Basile
téléguidé par un JJ Tremblay
«brainwashé» par nous savons qui. À bout de
souffle et rouge encore de colère Merlan se laissa tomber
lourdement sur sa chaise appelant du regard les réactions et
commentaires des membres de la Ligue des purs et durs réunis
autour de la table... Pendant ce temps, à
l’intérieur de la soucoupe, le robot-goûteur R2Nip,
appâté par un nouveau parfum, se laissa dériver en
état d’apesanteur jusqu’à la table bistro sur
laquelle Madame Fernande s’apprêtait à
déposer une de ses irrésistibles tourtières pur
porc sortie du contenant thermos qu’elle avait eu souci de
déposer dans son bagage personnel avant de monter à bord
de la soucoupe volante. Tien tien, dit-elle d’un air amusé
et revenu de toute surprise, un premier convive...
(Lise Breton)
Elle regarda,
avec un certain amusement, R2Nip engloutir sa tourtière dont la
pâte feuilletée semblait coincer dans l'engrenage de sa
mâchoire mécanique. Une bonne rasade de ketchup vert
allait lubrifier le tout. Basile le cochon entra dans la salle à
manger et salua Fernande et le robot goûteur. Fernande
commençait à le trouver plus sympathique,
renonçant tranquillement à l'idée de le manger un
jour. Après tout, il était plus utile vivant que servit
en jambon. Son charisme avait séduit les ambassadeurs
présents au sommet de la banlieue d'Orion dont il avait
gagné les faveurs. Elle se sentait maintenant, plus jamais, une
citoyenne de l'univers bien loin de Paul Merlan et de ses
préoccupations terrestres. Les extraterrestres avaient
apporté beaucoup de sérénité à la
ferme et dans toute la société. Elle se disait qu'il
était temps de laisser crever sur la planète terre tous
ceux et celles qui étaient réfractaire à
l'évolution. Elle aimait déjà la vie sur Orion
(Martin Boisvert)
La vie sur
Orion, était véritablement comme un coup de poing dans
l'abdomen. Tous cela était nouveau. Bien sûr, certains
était sympathisants, les autres réfractaires, mais la
raison finirait un jour ou l'autre par ranger les réfractaires
et les rebelles du côté des sympathisants. Tous ce qui est
nouveau fait peur, parce que l'inconnu est toujours imprévisible
et que cela bouleversé les vies bien installé dans un
cocon.
(Jean-claude Teroin)
Orion aux
éclats s'exclamèrent tous ceux et celles qui eurent
l'indicible joie de passer leurs vacances d'été aur la
planète. (Normand Lebeau)